Frank Lanot, Éloge du temps perdu

Quand on veut parler de ce livre jubilatoire, difficile de choisir le passage, plus on feuillette, plus on s’arrête…on a envie de tout partager !
Petit florilège en attendant la rencontre, qui soyez en sûrs vous rajeunira en vous remettant dans la peau de cet élève qui ne quitte pas des yeux son prof si génial.

« J’ai voulu, en écho à tous ces échanges, mettre sur le papier quelques uns des moments d’élucidation, ou d’exploration, le plus souvent d’interrogation, du lecteur devant le texte qu’il aime à lire. J’ai voulu consigner, en quelques médaillons brefs, et n’obéissant qu’à mon seul bon plaisir, ces instantanés que représente le face-à-face d’un lecteur avec l’évidence – et aussi l’énigme – des textes littéraires ».
page 12

« Les livres sont avec nous. Ils sont même contre nous, tapissant l’espace de nos murs, s’alignant sur des planches de bois, occupant des pans entiers de nos demeures ». page 87

« On entre dans un livre comme dans le flanc d’une rivière. Comme dans un lit. Comme dans un rêve. Chacun le sait, et surtout le sent. Heureux celui qui n’a encore jamais lu, et qui découvrira ce plaisir là, ce vice impunissable. On a dit et redit, chanté et rengainé, à satiété, cette traversée des signes. A-t-on autant dit ce que veut dire – et pas seulement signifie – « sortir d’un livre » ? Le fermer, et après la dernière page, rabattre la couverture, comme on le fait d’une porte ? Comme on recouvre un objet de silence et d’immobilité ? Comme la nuit bâche le jour finissant ?
Je veux ici me souvenir des livres dont on sort, mais qui ne sortent pas de leur lecteur. Tourner la page ? Tu parles ! Le rideau est tombé, la comédie est finie, les pages éblouies se sont envolées : et alors ? Il reste un je-ne-sais-quoi. »
page 165

Allez un dernier petit passage :
« Les écrivains savent des choses que nous ne savons pas. Et pourtant, lisant leurs livres, nous découvrons que ce que, avant eux, nous ignorions, ne nous surprend pas. Comme si une part de nous en avait eu connaissance, confusément, dans un en deçà des mots.
Colette m’émerveille parce qu’elle est émerveillée. Il naît de ses phrases une sorte de capillarité intense et pénétrante »
. page 169

Frank Lanot est l’auteur de La clef (Stock), Une balle de colt derrière l’oreille (Le Passeur), Retour à Blanchelande (Le Passeur) et Petits éloges du double (L’Observatoire).

Rencontre animée par Christine Hauze-Delagado le jeudi 9 février à 18h30.